Gérer une inaptitude à l'Emploi

Publié le par Jérôme Bry

Les salariés victimes de maladie ou d’accident d’origine professionnelle ou non, doivent être soumis, dans la plupart des situations, à une visite médicale de reprise. En cas de constat d’inaptitude, les obligations à la charge de l’employeur doivent être scrupuleusement respectées.

1. Constater l’inaptitude physique du salarié

Dans les huit jours de la reprise du travail après une absence pour cause de maladie professionnelle, après un congé de maternité, après une absence d’au moins huit jours pour cause d’accident du travail et après une absence d’au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel, le salarié doit bénéficier d’un examen par le médecin du travail (C. trav. R. 241-51). L’employeur doit prendre l’initiative de cette visite à laquelle le salarié ne peut se soustraire sous peine de commettre une faute. En cas de carence, le salarié peut solliciter lui-même la visite après en avoir averti l’employeur, sans qu’il puisse lui être reproché de ne pas l’avoir fait.

Rappel : seul le médecin du travail est compétent pour déclarer un salarié apte ou inapte (Cass. soc. 9 octobre 2001, n° 98-43.144). L’appréciation du médecin traitant, voire la mise en invalidité par le médecin conseil de la CPAM – notion de sécurité sociale étrangère au droit du travail –, sont inopérantes à cet égard..

: seul le médecin du travail est compétent pour déclarer un salarié apte ou inapte (). L’appréciation du médecin traitant, voire la mise en invalidité par le médecin conseil de la CPAM – notion de sécurité sociale étrangère au droit du travail –, sont inopérantes à cet égard..

Attention : en principe, le médecin du travail ne peut constater une inaptitude à l’emploi qu’après, outre l’étude du poste et des conditions de travail dans l’entreprise, un second examen médical du salarié espacé d’un délai de deux semaines du premier, le délai étant décompté à partir du jour du premier examen (Cass. soc., 8 décembre 2004, n°02-44.203).

Toutefois, le médecin peut émettre un avis d’inaptitude dès le premier examen en cas de danger immédiat pour la santé ou la sécurité du salarié ou des tiers (C. trav., art. L. 241-51-1), il est nécessaire que ce constat de danger soit mentionné sur l’avis d’inaptitude (Cass. soc., 4 juin 2002, n° 00-42.873), sachant que la Cour de cassation admet que la mention de l’article R. 241-51-1 du Code du travail pouvait suffire dès lors qu’en visant cet article, le médecin du travail avait nécessairement estimé qu’il existait une situation de danger immédiat au sens de cette disposition (Cass. soc., 19 janvier 2005, n° 03-40.765)

En cas de constat d’inaptitude lors du premier examen, sans que soit mentionnée sur l’avis la référence au danger immédiat, il appartient à l’employeur de provoquer une seconde visite. A défaut, le licenciement prononcé sur la base de l’avis émis lors de la 1ère visite médicale sera nul (Cass. soc., 26 mai 2004, n° 02-41.325)

En présence d’un avis d’inaptitude à l’emploi ou à tout emploi émis dans les conditions ci-dessus énoncées, peu importe que le salarié continue à adresser à l’employeur des arrêts de travail de son médecin traitant, la Cour de cassation considère qu’en pareil cas, l’intervention du médecin du travail s’effectue bien dans le cadre d’une visite de reprise et il incombe à l’employeur de tirer les conséquences de l’avis d’inaptitude (Cass. soc.,19 janvier 2005, 2 espèces, n° 03-41.479 et n° 03-41.904)

 

en principe, le médecin du travail ne peut constater une inaptitude à l’emploi qu’après, outre l’étude du poste et des conditions de travail dans l’entreprise, un second examen médical du salarié espacé d’un délai de deux semaines du premier, le délai étant décompté à partir du jour du premier examen ().

2. Tout mettre en œuvre pour reclasser le salarié

- Contenu de l’obligation de reclassement

Quelle que soit l’origine de l’inaptitude, l’employeur doit tout faire pour reclasser le salarié en

lui proposant un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que des mutations, transformations de postes ou d’aménagement du temps de travail …

Cette obligation de reclassement, au terme de la jurisprudence, trouve à s’appliquer que le salarié soit " seulement " inapte à son emploi ou inapte à tout emploi.

A noter : la reconnaissance par le salarié de ne jamais plus pouvoir travailler est inopérante à cet égard (Cass. soc., 10 mars 2004, n°03-42.744). Il en est de même lorsque le médecin du travail mentionne sur l’avis d’inaptitude que le salarié ne peut pas être reclassé dans l’entreprise (Cass. soc., 7 juillet 2004, n° 02-45.530).

: la reconnaissance par le salarié de ne jamais plus pouvoir travailler est inopérante à cet égard (). Il en est de même lorsque le médecin du travail mentionne sur l’avis d’inaptitude que le salarié ne peut pas être reclassé dans l’entreprise

Le chef d’entreprise peut à cet égard solliciter des aides, singulièrement si l’incapacité est liée à la survenue d’un handicap (aides matérielles ou financières de l’Agefiph par exemple : plus de précisions sur www.agefiph.asso.fr). Evidemment ne peuvent être proposés que des postes dont la nature est compatible avec les remarques écrites du médecin du travail. On ne peut que conseiller, en cas de doute, de s’assurer auprès du médecin de la pertinence des propositions qui vont être formulées au salarié.

S’il ne peut offrir au salarié qu’un poste de reclassement de catégorie inférieure et/ou entraînant une modification du contrat de travail, il doit lui en faire la proposition, entendu bien sûr que celui-ci peut librement refuser.

De la même manière qu’en cas de licenciement économique, le cadre retenu pour apprécier l’effort de reclassement est le groupe auquel appartient l’employeur, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel (Cass. soc., 17 octobre 2000, n° 98-41.960). L’employeur doit donc mettre en œuvre une recherche des possibilités de reclassement auprès des autres sociétés du groupe.

A noter : la preuve de l’exécution de l’obligation de chercher un reclassement incombe à l’employeur, il n’appartient pas aux juges de rechercher l’existence ou non d’un poste disponible correspondant aux capacités physiques du salarié. L’employeur devra dès lors pouvoir rapporter la preuve d’avoir étendu sa recherche non seulement aux postes existant mais peut être aussi potentiels, issus notamment d’une transformation.

: la preuve de l’exécution de l’obligation de chercher un reclassement incombe à l’employeur, il n’appartient pas aux juges de rechercher l’existence ou non d’un poste disponible correspondant aux capacités physiques du salarié. L’employeur devra dès lors pouvoir rapporter la preuve d’avoir étendu sa recherche non seulement aux postes existant mais peut être aussi potentiels, issus notamment d’une transformation.

: la reconnaissance par le salarié de ne jamais plus pouvoir travailler est inopérante à cet égard (). Il en est de même lorsque le médecin du travail mentionne sur l’avis d’inaptitude que le salarié ne peut pas être reclassé dans l’entreprise : la preuve de l’exécution de l’obligation de chercher un reclassement incombe à l’employeur, il n’appartient pas aux juges de rechercher l’existence ou non d’un poste disponible correspondant aux capacités physiques du salarié. L’employeur devra dès lors pouvoir rapporter la preuve d’avoir étendu sa recherche non seulement aux postes existant mais peut être aussi potentiels, issus notamment d’une transformation.

 

: la reconnaissance par le salarié de ne jamais plus pouvoir travailler est inopérante à cet égard (). Il en est de même lorsque le médecin du travail mentionne sur l’avis d’inaptitude que le salarié ne peut pas être reclassé dans l’entreprise : la preuve de l’exécution de l’obligation de chercher un reclassement incombe à l’employeur, il n’appartient pas aux juges de rechercher l’existence ou non d’un poste disponible correspondant aux capacités physiques du salarié. L’employeur devra dès lors pouvoir rapporter la preuve d’avoir étendu sa recherche non seulement aux postes existant mais peut être aussi potentiels, issus notamment d’une transformation.

- La prise en compte de l’avis du médecin du travail

Au moment où le salarié est déclaré inapte à son emploi, l’employeur doit solliciter du médecin du travail, si celui-ci ne l’a pas fait spontanément, toutes indications et suggestions utiles écrites lui permettant d’apprécier lesquels des postes de l’entreprise sont susceptibles de convenir au salarié.

- L’avis des délégués du personnel

La loi ne prévoit la consultation des délégués du personnel sur les mesures de reclassement uniquement lorsqu’il s’agit d’une inaptitude d’origine professionnelle. La Cour de cassation n’a pas étendu cette obligation aux inaptitudes d’origine non professionnelle (Cass. soc., 8 décembre 2004, n° 02-44.203)

Il s’agit d’une compétence exclusive des délégués du personnel, le comité d’entreprise ne saurait être utilement consulté en cas d’absence de délégués du personnel dans l’entreprise.

Le non respect de cette obligation de consultation ouvre droit pour le salarié à une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire

Attention : les entreprises d’au moins 10 salariés, soumises à l’obligation de mise en place des délégués du personnel, doivent, en l’absence de ceux-ci, être à même de produire un procès verbal de carence aux dernières élections : à défaut elles s’exposent au paiement de l’indemnité d’un montant minimal correspondant à 12 mois de salaires (Cass. soc., 7 déc. 1999, n° 97-43.106).

Les délégués du personnel doivent être consultés que l’employeur ait ou non la possibilité de proposer un ou des reclassements au salarié.

L’avis des délégués du personnel doit par ailleurs être sollicité avant que la ou les proposition(s) de reclassement ne soi(en)t formulée(s) au salarié.

A noter : si la Cour de cassation n’impose pas à l’employeur de recueillir cet avis collectivement au cours d’une réunion (Cass. soc., 29 avr. 2003, n° 00-46.477), sur le plan pratique, il est préférable de la tenir, non seulement pour se ménager la preuve du respect de cette mais aussi pour faciliter l’organisation de cette consultation dès lors que l’employeur doit leur fournir toutes informations nécessaires pour apprécier les possibilités ou non de reclassement, sauf à devoir assumer les conséquences du non respect de la procédure, soit une indemnisation correspondant au minimum à douze mois de salaire (Cass. soc., 13 juillet 2004, n°02-41.046).

: si la Cour de cassation n’impose pas à l’employeur de recueillir cet avis collectivement au cours d’une réunion (), sur le plan pratique, il est préférable de la tenir, non seulement pour se ménager la preuve du respect de cette mais aussi pour faciliter l’organisation de cette consultation dès lors que l’employeur doit leur fournir toutes informations nécessaires pour apprécier les possibilités ou non de reclassement, sauf à devoir assumer les conséquences du non respect de la procédure, soit une indemnisation correspondant au minimum à douze mois de salaire ().

     

  • Les offres de reclassement

     

: si la Cour de cassation n’impose pas à l’employeur de recueillir cet avis collectivement au cours d’une réunion (), sur le plan pratique, il est préférable de la tenir, non seulement pour se ménager la preuve du respect de cette mais aussi pour faciliter l’organisation de cette consultation dès lors que l’employeur doit leur fournir toutes informations nécessaires pour apprécier les possibilités ou non de reclassement, sauf à devoir assumer les conséquences du non respect de la procédure, soit une indemnisation correspondant au minimum à douze mois de salaire ().

 

Suite à l’examen des possibilités de reclassement, trois situations sont à distinguer.

Le reclassement est impossible

En l’absence de tout poste pouvant convenir au salarié, tenant soit à l’absence de qualification professionnelle requise, soit du degré d’incapacité du salarié, l’employeur n’est tenu à une obligation d’information écrite du salarié qu’en cas d’inaptitude d’origine professionnelle

En pareil cas, doivent être exposés les motifs qui s’opposent au reclassement du salarié.

Cette énonciation écrite des motifs qui s’opposent au reclassement doit intervenir antérieurement à la mise en œuvre de la procédure de licenciement. Elle ne saurait être intégrée dans la lettre de convocation à l’entretien préalable.

Le reclassement est possible et accepté par le salarié

Si le reclassement est accepté par le salarié, une confirmation écrite de sa part est vivement recommandée. L’employeur ne manquera pas de formaliser l’éventuelle modification du contrat de travail par un avenant ; en cas de reclassement au sein d’une autre entreprise du groupe, il pourra être procédé par voie de convention tripartite stipulant notamment les conditions de la reprise du salarié par le nouvel employeur (conservation de l’ancienneté, etc.). Le reclassement est possible mais refusé par le salarié Le salarié peut valablement refuser un poste de reclassement sans que son refus puisse être considéré comme fautif que le poste proposé emporte (Cass. soc. 9 avril 2002, n°99-44.678) ou non (Cass. soc. 9 avril 2002, n° 99-44.192) modification du contrat de travail. Dès lors il appartient à l’employeur de tirer les conséquences du refus du salarié soit en formulant de nouvelles propositions, ce qu’il aura généralement déjà fait dans la mesure du possible, soit en procédant au licenciement de l’intéressé au motif de l’impossibilité de reclassement. Le refus abusif du salarié a toutefois une incidence sur les indemnités de rupture dues en cas de licenciement consécutif à une inaptitude d’origine professionnelle.

3. Procéder au licenciement

- Une rupture " obligatoire "

Si le salarié n’est pas reclassé, par défaut de reclassement possible ou par suite du refus du reclassement, l’employeur peut procéder au licenciement du salarié. Les textes incitent fortement au licenciement. En effet si, à l’issue du délai d’un mois commençant à courir à compter du second examen médical, le salarié n’est ni reclassé, ni licencié, l’employeur doit lui verser, dès l’issue de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que le salarié occupait avant la suspension du contrat de travail.

Attention : ce délai d’un mois ne souffre pas d’exception. Ainsi, il n’est pas reporté pour tenir compte soit de la durée de la procédure d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé ou de la durée du recours devant l’inspecteur du travail en cas de contestation de l’avis du médecin du travail.

ce délai d’un mois ne souffre pas d’exception. Ainsi, il n’est pas reporté pour tenir compte soit de la durée de la procédure d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé ou de la durée du recours devant l’inspecteur du travail en cas de contestation de l’avis du médecin du travail.

- Une rupture indemnisée

Lorsque le licenciement est prononcé suite à une inaptitude d’origine non professionnelle, l’indemnisation du salarié est réduite. Dès lors que du fait de l’inaptitude, il n’est pas à même de pouvoir exécuter le préavis, il ne peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis. Par contre il bénéficie de l’indemnité légale de licenciement, voire de l’indemnité conventionnelle si la convention ne l’exclut pas en pareil cas.

Lorsque l’inaptitude est d’origine professionnelle, le salarié licencié bénéficie :

- d’une indemnité calculée comme l’indemnité compensatrice de préavis et ce même si le salarié n’est pas à même de l’exécuter. Selon la Cour de cassation, cette indemnité, bien que calculée comme l’indemnité compensatrice de préavis n’en a pas la même nature (Cass. soc., 15 juin 1999, n° 97-15.328) et dès lors son versement n’a pas pour effet de reporter le terme du contrat de travail. De même, cette indemnité ne saurait être prise en compte pour le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés (Cass. soc. 4 décembre 2001, n°99-44.677). S’agissant de son sort au regard des cotisations sociales, si la Cour de cassation avait opté pour son assujettissement (Cass. soc.,, 4 oct. 1990, n° 88-16.990) elle avait considéré, alors, que cette indemnité avait la même nature que l’indemnité compensatrice de préavis. On peut s’interroger aujourd’hui, au regard de la dernière jurisprudence, sur cet assujettissement ; le caractère indemnitaire des indemnités versées au salarié ne doit-il pas l’emporter ?

- d’une indemnité spéciale de licenciement, quelle que soit l’ancienneté du salarié, qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité légale de licenciement

Les indemnités ci-dessus visées, en cas d’inaptitude d’origine professionnelle ne sont toutefois pas dues par l’employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif. N’est pas abusif le refus d’un reclassement s’accompagnant d’une modification du contrat de travail ; par contre sera considéré abusif le refus d’un poste approprié aux capacités du salarié et comparable à l’emploi précédemment occupé sans autre motif que celui tenant au seul fait de changer de poste de travail (Cass. soc., 7 mai 1996, n° 92-42.572)

- Particularité des contrats à durée déterminée

Lorsque le salarié concerné est titulaire d’un contrat à durée déterminée, seule la situation du salarié ayant une inaptitude d’origine professionnelle est prévue. En pareil cas, l’employeur doit mettre en œuvre la procédure de résolution judiciaire du contrat de travail (C. trav. art. L. 122-32-8). La compensation financière due au salarié est alors fixée par la juridiction.

Pour les autres, rien n’est prévu. La Cour de cassation (avis C. Cass. 29 avril 2002) a considéré que la résiliation judiciaire du contrat n’était pas possible en cas d’inaptitude d’origine non professionnelle. L’inaptitude n’est pas un cas possible de rupture anticipée du contrat de travail, même si les conséquences d’une telle rupture ne s’avèrent pas financièrement importante pour l’entreprise, (Cass. soc., 18 novembre 2003, n° 01-44.280)

Publié dans Droit du travail

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